Suite au collectage de paroles que j’ai mis en place de 2016 à 2020 entre mon père et moi, j’ai restitué en texte ces paroles porteuses d’une histoire atypique que j’ai intitulé « La Boule de neige ».
J’ai retranscrit les paroles de ce père qui est né, on suppose en 1938 à Aït Chaou, petit village berbère à quelques kilomètres de la ville de Fès au Maroc.
De 1938 à 1968, mon père a traversé l’une des pages les plus riche de l’histoire du Maroc.
De la seconde guerre mondiale, il a gardé des souvenirs d’enfant. Puis son éducation au collège berbère l’a amené petit à petit vers un destin particulier. La fin du protectorat a été un tournant dans son parcours. Il est rentré dans la gendarmerie royale, dans l’escorte d’abord du roi Mohamed V puis son fils Hassan II.
Puis, dans l’équipe de Basket-ball des Forces armées royales, il fît une grande carrière de sportif, sans jamais oublier ses racines berbères.
Ce besoin de raconter l’histoire d’un Maroc disparu me semble essentiel. Raconter la grande histoire chargée de vérité, d’humour, de drames à travers la « petite histoire » d’un homme est le trait d’union d’une humanité commune.
La forme envisagée de restitution de ce récit sera une lecture spectacle.
Extrait de La Boule de Neige
« Une autre fois, on escortait le Roi Mohamed V qui devait aller à Oujda pour visiter cette province lointaine. Dans le protocole, il devait s’arrêter à Aït Sadden, au village pour rendre hommage à notre tribu qui avait eu un passé fabuleux à l’époque des événements.
Quand on est arrivé, on lui a offert un cheval, des dattes et du lait. Moi j’étais là.
Et juste à côté de moi, il y avait mon père, l’oncle Ali, Driss et Carda, les quatre frères, les tantes et les personnalités de Aït Sadden.
Mon père ne regardait pas le Roi Mohamed V, il me regardait, moi. Il était tellement fier. Et moi, je l’ai regardé, je lui ai fait un sourire et j’ai hoché la tête comme si je lui disais : « Oui, papa, tu vois… ».