Idées

Les Rendez-vous de la Philosophie à Rabat le samedi 16 novembre !

Thématique générale 2024 : L’Universel en tension

Événement fortement plébiscité par le public marocain, les Rendez-vous de la philosophie reviennent le samedi 16 novembre 2024 à Rabat pour une dixième édition exceptionnelle, sous le thème « L’universel en tension ».

Retrouvez le programme détaillé ci-dessous par tranche horaire ainsi que le dépliant de la soirée ici.

Samedi 16 novembre de 10h à 12h : Conférence publique à deux voix : Dialogue entre Souleymane Bachir Diagne et Frédéric Worms.

Institut Royal pour la Recherche en Histoire du Maroc

Souleymane Bachir Diagne : L’universel : pourquoi le verbe à l’infinitif ?

Frédéric Worms : L’universel, pourquoi le négatif ?

Souleymane Bachir Diagne est Philosophe, après avoir été conseiller pour l’éducation et la culture d’Abdou Diouf, ancien Président de la République sénégalaise, professeur à l’Université Columbia de New York. Il est spécialiste de la philosophie islamique et de l’histoire des sciences. 

Frédéric Worms est Philosophe, professeur de philosophie contemporaine, directeur de l’École normale supérieure de Paris. Il a récemment publié Le pourquoi du comment, (Flammarion, 2024), La vie (Collection Qu’est ce que ça change, Labor & Fides, 2024), Le vivable et l’invivable (avec Judith Butler, P.U. F, 2021).

Samedi 16 novembre de 18h à 23h : grande nocturne à la Faculté des Sciences de Rabat

Faculté des Sciences de Rabat 

Soirée de débats et d’échanges dans une ambiance festive en présence d’une trentaine de philosophes et personnalités en provenance du pourtour méditerranéen, d’Afrique subsaharienne, du Golfe arabique et d’Europe. Des conférences en français et en arabe pour célébrer la pensée !

Pour s’être longtemps cru le foyer et l’agent de l’universel, l’Europe s’était habituée à se poser en seigneur et maître, sinon en arbitre des peuples et des nations. Elle parlait au nom de l’humanité. L’universalisme des Lumières et des droits de l’homme s’inscrit à cet égard dans le prolongement de l’héritage qu’elle estimait avoir reçu de toute antiquité et qui l’autorisait naturellement à ses yeux à tenir le langage de l’universel.

 

Ainsi, s’il faut réinterroger l’idée d’universel, ce n’est pas seulement parce qu’elle a été discréditée par trois siècles d’hégémonie occidentale dont elle a servi les intérêts mais également parce qu’elle a lié le destin des peuples à une aventure moderne qu’on sait désormais incertaine.Faudrait-il craindre pour autant le relativisme et l’aplatissement des points de vue ? Mais il n’y a pas d’événement, catastrophe naturelle, guerre ou un massacre quelque part, qui ne soit observé dans le monde entier et qui, en retour, ne regarde pas toute l’humanité. Partout, tout a une résonance universelle.

 

En sollicitant la philosophie pour refonder une notion rendue aussi suspecte et contestable qu’indispensable à la réflexion des temps présents, elle doit dès lors éviter deux écueils : exclure l’universel, n’admettre que l’universel. L’exclure, car c’est renoncer à la raison et compenser par la force ou les passions la faiblesse d’un argument. N’admettre que lui, car c’est confondre l’idéal et la norme et vouloir réduire au silence la voix des minorités en les accusant de séparatisme ou de communautarisme.

 

Notre but sera donc double : penser l’universel par rapport à ses finalités et par rapport aux contextes dans lesquels il est appréhendé. Il n’est pas d’opposer d’emblée un bon et un mauvais universel mais de les mettre en tension afin d’explorer leurs différentes possibilités depuis la situation qui est la nôtre aujourd’hui.

Emmanuel Alloa : En finir avec l’universel vertical

Une déclaration comme celle des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 peut-elle être universelle, lorsque l’on sait qu’elle a été prononcée par une petite assemblée d’hommes, à l’exclusion des femmes et des étrangers ? Le fait que toute demande d’universalité soit toujours énoncée depuis un lieu et un temps spécifique n’invalide-t-il pas sa portée ? Il devient urgent aujourd’hui d’en finir avec l’illusion entretenue par l’universalisme, celui d’un universel vertical ou de surplomb. Refusant à la fois cet universel de surplomb et une conception du monde comme simple juxtaposition de différences, il s’agit de repenser l’universel. Universel sans universalisme, cet « universel latéral » est celui qui émerge lorsque se croisent nos points de vue inconciliables.

Philosophe, professeur d’esthétique et de philosophie de l’art à l’Université de Fribourg, Président de la Société allemande d’esthétique (Deutsche Gesellschaft für Ästhetik). Ses travaux ont été récompensés par plusieurs prix, dont le prix Latsis 2016 et le Wissenschaftspreis Aby Warburg 2019. 

Jean-Baptiste Brenet, Camille Riquier et Driss Ksikes : Ibn Rushd (Averroès) en peinture : un refoulement de la pensée arabe ?

Pendant deux cent cinquante ans, entre le XIVe et le XVIe siècle, on a peint en Italie des « Triomphe de saint Thomas d’Aquin » où le théologien chrétien (mort en 1274) apparaît dominant Ibn Rushd (Averroès, mort en 1198) assis ou étendu à ses pieds. Que vient faire sur ces toiles le grand commentateur arabe d’Aristote ? Quel est le sens de cette figuration, a priori négative, qui se répète à travers les âges ?

Il est clair que ces œuvres de propagande travestissent la réalité du rapport complexe d’héritage et de relance que la pensée « européenne » aura entretenu avec la pensée arabe ; mais il se peut qu’elles se trahissent, aussi, laissant voir ce qu’elles entendaient recouvrir. Dedans, et non pas dehors, Averroès, songeur, est un motif inattendu et insistant : le véritable « sujet » de tous ces « Triomphe» ?

Jean-Baptiste Brenet est philosophe, professeur des Universités à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne où il enseigne la philosophie arabe. Depuis 2021, il a lancé et anime à l’Institut du Monde Arabe (IMA, Paris), les mardis de la philosophie arabe. 

Camille Riquier est philosophe, professeur et doyen de la faculté de philosophie à l’Institut Catholique de Paris, membre de la revue Esprit et lauréat de l’Académie française pour son ouvrage Archéologie de Bergson qui a reçu le prix La Bruyère. Il est co-rédacteur des annales bergsoniennes.  

Driss Ksikes est écrivain, dramaturge et directeur d’Economia, centre de recherche de HEM, où il encadre des équipes de recherche interdisciplinaires et enseigne la philosophie et les grands débats politiques. Chercheur en médias et culture et auteur associé à plusieurs revues littéraires et critiques internationales, il est à l’initiative de projets mettant l’art, la culture et le débat au cœur de la cité. Il est membre du groupe international de travail sur Arts et Recherches auprès de AFAC (Arab Fund for Arts and culture) et ACSS (Arab Council for Social Sciences) et depuis 2019 membre du comité scientifique du CODESRIA. 

Bennacer El Bouazzati (AR) Entre localité et universalité

كل جديد في الفكر والمعرفة ينبت محلّياً. وكل تجديد في الرؤى والتصورات يتبلور في ظروف اجتماعية وثقافية مخصوصة. أيضاً، تنشأ الأعراف والقوانين في ملابسات تاريخية مطبوعة بمميزات ثقافية وإديولُجية خاصّة. وحتى في سياق أدقّ العلوم وأكثرها تجريداً، وعلى رأسها الرياضيات، تبرز المفاهيم ضمن مقام يفعل فيه فاعلون يتبادلون الأمثلة والأدلة والنماذج. وقد تنتشر المنشآت الجديدة في فضاء ثقافي يسمح لها بذلك، وقد تتعرّض لمقاومة؛ والأبنية العلمية مرّت من هذا المسلسل، حيث لا يوجد تجديد علمي لم يشهد مقاومة حتّى من لدن أفراد من الجماعة العلمية بالذات التي ينتمي إليها صاحبُ الفكرة الجديدة. فكيف يصبح تجديد ما مقبولاً كونياً، بينما يظل اقتراح ما حبيس الظرفيات المحلية؟ لا يدّعي صاحب الورقة التيان بجواب شاف؛ لكن نتمنى مناقشة بنّاءة

Philosophe, professeur d’épistémologie et d’histoire des Sciences à la faculté des lettres et des sciences humaines de l’Université Mohammed V. Il est président de l’Association Marocaine de l’Histoire des Idées Scientifiques et Philosophiques.  

Abdou Filali El Ansary : Les illusions de la singularité

L’idée est de repenser, à partir de l’œuvre de Ali Abderraziq (auteur de L’islam et les fondements du pouvoir) et de Thomas Bauer (auteur de A Culture of Ambiguity: An Alternative History of Islam), le fait que des confusions entre parcours historiques et moments normatifs ont mobilisé énormément d’énergies intellectuelles, sans parvenir à éclaircir les relations entre normes et leurs implémentations dans l’histoire. 

Philosophe et écrivain, co-fondateur de Prologues, revue maghrébine du livre destinée au public arabe et francophone, directeur de l’Institut d’études des civilisations islamiques à l’université Agha Khan à Londres.  

Elie During : L’impératif extra-terrestre

L’intelligence extra-terrestre n’est pas une question de fait, de conjecture ou de croyance, mais de principe : comme le disait Pascal, « il faut parier ». Et ce quelle que soit la portée qu’on donne au terme « extra-terrestre ». Ce dernier peut désigner aussi bien un petit bonhomme vert que l’entendement divin ou qu’un système d’intelligence artificielle. Et sans parler d’intelligence, l’existence probable d’une vie extraterrestre appelle déjà une généralisation du concept de vie (« lyfe »). La philosophie a-t-elle pris la mesure du décentrement et de la relativisation de l’universel humain qu’implique cette situation ?

Philosophe, maître de conférences à l’Université Paris Nanterre, directeur de la collection « MétaphysiqueS » aux PUF. Ses recherches portent sur les figures contemporaines de la simultanéité au croisement de la métaphysique, de l’art et de la science.  

Natalie Depraz : Que fait la surprise à l’universel ?

Peut-on philosopher sans surprise ? Qu’est-ce qu’une philosophie sans surprise ? J’essaierai de montrer que la surprise oblige les philosophes, si tant qu’elles et ils sont soucieux de s’extraire de son mode dominant, caractérisé par une ontologie de la puissance et une logique du contrôle, lesquelles génèrent prise et emprise. A contrario, une philosophie de la surprise travaillera avec la déprise, avec le lâcher-prise, où s’ouvrent renouvellement de soi et recréation du sens. La question étant : où se situe l’universel sur cette brèche qu’ouvre la surprise ? Du côté de la singularité ? Ou bien de la totalité unifiée ?

Philosophe, professeure à l’université Paris Nanterre. Spécialiste de philosophie allemande et de phénoménologie, elle dialogue avec les champs scientifiques, politiques et littéraires.   

Yamina Adouhane : L’universel en tension : les apports de la philosophie médiévale arabe à une querelle plurimillénaire

Si l’ancrage historique et géographique des critiques décoloniales de l’universalisme fait paraître anachronique un retour au Moyen-âge pour penser l’universel, la conférence visera à montrer ce que la philosophie médiévale arabe peut apporter au débat, tant par la clarification des termes du problème et par les solutions élaborées que par l’expérience même qu’elle constitue d’une pensée aux confluents de diverses cultures, langues et traditions.

Philosophe, spécialiste de philosophie arabe médiévale. Son travail porte sur les liens entre théologie et philosophie dans le monde musulman à travers la traduction et le commentaire d’un ouvrage méconnu du théologien al-Miklātī. 

Vincent Delecroix : Une communauté universelle est-elle envisageable ?

L’idée d’une unification du genre humain, transcendant les conflits de valeurs comme les affrontements politiques ou les divisions nationales, procède d’une pensée utopique qui peut être regardée comme dimension fondamentale de la raison philosophique, et non pas seulement comme une rêverie brumeuse et bien intentionnée ou comme une promesse religieuse. La réalisation d’une communauté universelle constitue ainsi l’un de ses horizons possibles. Mais sur quels principes ? Et à quel commun devrait renvoyer une telle communauté ? À moins qu’elle ne construise par elle-même ce commun, mais selon quelles modalités ? Car la logique de la communauté est aussi celle de l’exclusion – et dans ce cas l’idée de communauté universelle est contradictoire – ou celle de l’effacement autoritaire des différences constitutives. On interrogera donc l’idée de communauté comme forme adéquate d’une réalisation historique de l’universel.

Philosophe et romancier, spécialiste de Kierkegaard, directeur d’études à l’École Pratique des Hautes Études en Philosophie de la religion. Il a reçu le Grand Prix de l’Académie Française pour l’ensemble de son œuvre littéraire.  

Iman Mersal – Tarek El Ariss (AR) La violence du présent entre mémoire et archive

Modération : Abdelhay Moudden

لماذا تنشغل كتابة ما بقراءة الماضي؟ ما الفرق بين فعل قراءة الماضي ومجرد توثيق الجروح الفردية والجماعية؟ ما هو دور الذاكرة، الإيديولوجيا، الأرشيف في كتابة الكوارث التي ورثناها من الماضي؟ وهل يختلف موقع الذات طبقاً للنوع الأدبي (سيرة ذاتية / غيرية أو قصيدة أو رواية… إلخ) أم حسب أسئلتها بصرف النظر عن موقعها في السرد؟

نتناول هذه الأسئلة من خلال الحديث عن ممارسة الكتابة والنوع الأدبي والعلاقة بين التوثيق والتخييل وارتباط كل ذلك بالسعي إلى مواجهة عنف الحاضر وميراثه الثقيل.

Tarek El Ariss, titulaire de la chaire James Wright et chef du département d’études sur le Moyen-Orient à Dartmouth College. Il traite des questions de déplacement, de guerre et de désir. Il interroge le concept de modernité dans le monde arabe et notamment la littérature et sa spécificité vis-à-vis de l’Occident.  

Iman Mersal, poétesse reconnue comme une écrivaine majeure de la littérature et de la poésie égyptienne et féministe, Prix du Sheikh Zayed Book Award 2021. Elle enseigne à l’université d’Alberta au Canada.   

Mohamed Amer Meziane : La libération du monde reste à faire. Comment le Maghreb peut transformer la théorie décoloniale.

Cette conférence s’intéressera à deux questions enchevêtrées. 1. Comment réécrire l’histoire globale de la colonisation et des empires à partir de l’histoire du Maghreb à partir de 1830 ? 2. Comment la réécriture de cette histoire d’un point de vue maghrébin conduit-elle à repenser la géographie de la décolonisation, exprimée entre autres dans Les damnés de la terre ? Il s’agira ainsi de s’intéresser à la manière dont certains auteurs dits francophones ont pu déployer une pensée propre de la « décolonisation du savoir » bien avant les théories postcoloniales ou décoloniales anglophones ou latino-américaines.

Philosophe, professeur à Brown University (États-Unis). Membre du comité de rédaction de la revue Multitudes. Il élabore une critique de l’anthropologie actuelle, promouvant la prise en compte de la diversité religieuse et remettant en cause l’eurocentrisme.

Souad Ayada : Renoncer à l’universel ? Gain imaginaire et perte réelle

L’universel est une représentation de l’entendement qui ne possède aucune des propriétés de ce qui existe concrètement. Les idées, les expressions, les positions qu’il nourrit n’ont donc pas un contenu immédiatement identifiable, si bien qu’elles peuvent légitimement apparaître comme des abstractions. Telle est la raison profonde de la critique qui est aujourd’hui faite de l’universel, critique qui renoue par bien des aspects avec celle, plus ancienne, de l’universalisme abstrait des Lumières. Nous montrerons quel est le prix à payer pour une telle destruction et pourquoi, sans renoncer à l’ambition de l’esprit critique, il est indispensable de préserver l’idéal d’une raison universelle.

Philosophe, inspectrice générale de l’éducation nationale, membre correspondant de l’Académie des sciences morales et politiques. Elle a coordonné le numéro thématique «Philosophie en islam » de la Revue philosophique de la France et de l’Étranger (2024). 

Gwenaëlle Aubry : L’expérience littéraire, l’universel et l’impersonnel

« La littérature ne commence que lorsque naît en nous une troisième personne qui nous dessaisit du pouvoir de dire Je », note Deleuze dans Critique et clinique. C’est l’expérience de cette émergence que je voudrais décrire. Si l’on se prête, en lisant, en écrivant, à un exercice de dépersonnalisation, n’est-ce pas parce que l’espace de la littérature s’ouvre dans le jeu entre l’intériorité et l’impersonnel plutôt que dans celui entre l’intime et l’universel ?

Philosophe, directrice de recherche au CNRS. Elle est également romancière, auteure d’une quinzaine de livres, traduits en dix langues, dont Personne, Prix Femina en 2009. 

Philippe Büttgen : Reconnaître sans réparer ? Le monde comme confession

Les actes de reconnaissance officielle de crimes contre l’humanité (esclavage, Shoah, apartheid) ont pris une place croissante sur la scène internationale au cours des quarante dernières années. Jacques Derrida a pu parler d’un « théâtre de l’aveu », caractéristique de ce qu’on appelle mondialisation. Cette nouvelle dramatique universelle de la confession appelle toutefois une clarification. Contrition, pardon, réparation : les vieilles structures de la pénitence chrétienne sont-elles en train de se reproduire à l’échelle du monde ? L’exigence de reconnaissance suscite-t-elle de nouveaux missionnaires ? Et se pourrait-il que dans la demande des subalternes s’impose encore cela même qui les a rendus tels ?

Philosophe, professeur de philosophie des religions à l’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Il travaille sur les confessions religieuses et le sécularisme.   

Michaël Foessel et Mouhamadou El Hady Ba : Comment « faire monde » aujourd’hui ?

Modération : Clotilde Nouët

La crise actuelle de l’universel se traduit par une difficulté grandissante à « faire monde ». En se provincialisant, l’Occident a perdu son monopole sur l’universel. Reste à déterminer toutefois ce qui est par là désigné. Nous proposons une discussion autour de quatre questions. S’il y a crise, quel diagnostic poser ? De quels outils critiques disposons-nous pour la penser ? Quelle place revient aux savoirs non occidentaux dans la recomposition de ce « monde d’après »? L’enjeu est-il, au-delà des humains, d’élargir l’universel au vivant ?

Michaël Foessel est philosophe, professeur à l’école Polytechnique, co-directeur de la collection l’Ordre philosophique aux éditions du Seuil avec Jean-Claude Monod, chroniqueur au journal Libération. Son travail porte notamment sur le sens et les risques de l’expérience démocratique et sur le cosmopolitisme. 

Mouhamadou El Hady Ba est philosophe, Maître de conférences en logique et philosophie analytique à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar (UCAD) et Associate Research Scholar à l’Université du Connecticut à Storrs. Il enseigne essentiellement la philosophie des sciences et s’intéresse aux épistémologies dites du Sud Global.   

Nabil Faziou (AR) Est-ce que les promesses des lumières sont finies ?

غرضنا من هذه المداخلة فحص معقولية التصوُّر الذي يعلن فشل المشروع الأنواري انطلاقا من المآل المأساوي لوعوده كما تشهد على ذلك الأحداث الأخيرةالتي هزَّت كيان العالم عامَّة، والعالم العربي منه على وجه الخصوص. حملت تلك الأحداث كثيراً من المفكرين- العرب كما الغربيين- على إعلان رفضهمالقطعي للأنوار وشعاراتها، بل وعلى إعلان الردَّة بوعودها أيضاً، فهل من حقنا اليوم أن نؤمن لكونية ينسفها الواقع؟ هل ما يزال بمقدورنا، بل ومن حقنا أيضاً،أن نواصل رحلة التفكير في الأنوار وفلسفتها؟ هل يتعلق الأمر بعطب في بنية الفكر الأنواري، أم بانزياحٍ عن مساره؟

Professeur de philosophie à l’université Hassan II, Casablanca. Sa dernière publication (en arabe) est Hannah Arendt : La modernité politique et la crise du vivre ensemble (2022).

Séverine Kodjo-Grandvaux et Bado Ndoye : Peut-on encore parler d’humanisme aujourd’hui ?

Modération : Kenza Sefrioui

L’idée est d’interroger l’humanisme moderne qui a permis l’avancée des droits humains et la reconnaissance du droit à la dignité de toutes et de tous, mais qui a eu aussi un versant moins lumineux en justifiant l’entreprise coloniale à travers l’idée de « mission civilisatrice ». Il s’agira de revenir sur le modèle « d’homme » qui a été érigé (les premiers droits humains ne s’appliquaient ni aux femmes ni aux Noirs). De plus, ce modèle s’est construit sur une séparation nature/culture remise en question à l’ère de l’anthropocène.

Ce thème permettra donc de revenir sur l’héritage des Lumières et les limites de l’universalisme et d’aborder des questions politiques contemporaines (comment faire humanité aujourd’hui ? ; un cosmopolitisme est-il possible ? ; comment habiter ensemble la Terre ; penser des modèles d’humanité qui ne soient ni patriarcaux ni racistes, etc. ) et écologiques (place et rôle de de l’humain parmi le vivant ; question de la centralité de l’humain : un humanisme non anthropocentrique est-il possible ?)…

Séverine Kodjo Granvaux est philosophe, journaliste au Monde, chercheuse associée au Laboratoire d’études et de recherches sur les logiques contemporaines de la philosophie de l’université Paris 8. Elle est également responsable du Laboratoire Économie du vivant de la Fabrique de Suza, au Cameroun. 

Bado Nodye est philosophe, spécialiste de phénoménologie et d’histoire des sciences, il enseigne la philosophie à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar. Spécialisé en phénoménologie et en histoire des sciences, il se passionne depuis dix ans pour la philosophie africaine et les théories décoloniales.   

Mohamed Maouhoub (AR) « Modèle de tension autour de l’universel »

نموذج من الصراع حول الكوني

النموذج الذي اقترح الوقوف عليه في مداخلتي هو الصراع الذي دار في القرن الرابع الهجري بين داعية النحو، السيرفي، وداعية الفلسفة والمنطق، متى بنيونس. اسعى للايقاف على تصورهما معا للكوني الذي يستغرقهما معا، ويجعل مناظرتهما تكاد تكون أشبه ما تكون بحوار بين طرشان. اتساءل أخيرا عما الذييميز هذا الصراع حول الكوني عن صراعاتنا حوله كمحدثين

Philosophe, professeur de philosophie à l’université Cadi Ayad de Marrakech. Spécialiste de philosophie allemande, il est également traducteur d’ouvrages de l’arabe vers le français.

Fabienne Brugère : Que faire de notre vulnérabilité commune?

On peut caractériser le monde d’aujourd’hui à travers les situations de vulnérabilités qui affectent les êtres humains (vitales, socio-économiques, écologiques). Comment construire une société qui puisse prendre soin de nos vulnérabilités ? Le « prendre soin » de toutes et de tous peut-il dessiner un projet démocratique ?

Philosophe, professeure de philosophie à l’Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis. Elle travaille sur la philosophie de l’art,  morale et politique. Elle a dirigé de nombreux livres sur Spinoza, Foucault, Judith Butler, le libéralisme, l’œuvre d’art.   

Farah Cherif Zahar : La modernité est-elle universelle ?

L’une des définitions de la modernité la présente comme une époque de l’histoire des pays occidentaux marquée par le triomphe de la rationalité, du progrès scientifique et technique, de la démocratie ou encore de la liberté. Selon un certain discours, cette modernité occidentale devrait être étendue à l’ensemble du monde en vertu même de l’universalité de ses principes. En nous appuyant en particulier sur des positions issues de la philosophie arabe contemporaine, nous nous demanderons si la modernité ainsi définie est un phénomène historique exclusivement européen, ou si elle est, au moins en partie, universalisable. Les principes et concepts issus de la philosophie des Lumières sont-ils universels ? Faut-il les réactiver ou les abandonner au profit de concepts plus islamiques ? Peut-on distinguer entre « l’esprit » universel et théorique de la modernité et « l’application » européenne réelle et particulière de cet « esprit » ?

Philosophe et maîtresse de conférences à l’université Paris 8, spécialiste de philosophie grecque ancienne et de philosophie arabe. 

Adil Hadjami (AR) : Une musique sans monde – De l’universalité de la musique par-delà les musiques du monde

من حدوس الفيثاغوريين إلى  » الموسيقا المتآنية » للذكاء الصناعي، حضرت الموسيقا دائما، باعتبارها « رياضيات للتناغمات » الكونية؛ باعتبارها طموحا لتهجّي « المطلق » جماليا. بيد أن هذا النزوع الكلي، يصطدم بحقيقة أولى، وهي أن الموسيقا هي أيضا مسألة أذواق فردية وتعبيرات وجدانية وانتماءات ثقافية وتاريخية محددة. بعيدا عما يتقدم اليوم باعتبارها « الموسيقا »، أي « موسيقا العالم » المجسدة هنا والآن، ما الذي يمكن قوله بخصوص هذه المفارقة: كونها طموحا للمطلق لا يتحقق إلا « ذاتيا »؟ هذا ما سيحاول المحاضر الحديث عنه، من خلال حوار مع نصوص تاريخ الفلسفة ونصوص باحثين معاصرين آخرين (فرانسيس فولف خصوصا

Philosophe, écrivain et traducteur. Professeur d’histoire de la philosophie à l’Université Rabat – Mohammed V. Spécialiste de philosophie française contemporaine, il s’intéresse également à la théorie et histoire de la musique. Lauréat du Grand prix du livre du Maroc et du Prix Cheikh Zaid . 

Mohamed Cheikh (AR) : Lumières et anti-lumières en islam

لئن كان « التنوير » يعني إرادة المعرفة ونشرها من أجل تحرير الإنسان من غِلَّيْ الجهل والتعصب، فإنه ما كان حكرا على حقبة من التاريخ الغربي محدودة في الزمان محصورة في المكان، وإنما أمكن أن يتبدى « التنوير » في مختلف التقاليد الثقافية تحت مسميات عدة وبألوان شتى. وما كان التاريخ الثقافي العربي الإسلامي بدعا من هذا. يدعي صاحب هذه المحاضرة أن هذا التقليد شهد على صراع ضاري بين « اهل التنوير » ـ الذين رغبوا في المعرفة ـ و »خصوم التنوير » ـ الذين رغبوا عن المعرفة.

Philosophe, professeur de philosophie à l’université Hassan II (Casablanca). Auteur d’une vingtaine de livres sur la modernité et l’héritage arabo-islamique, dont « Le livre de la sagesse arabe : la voie du patrimoine arabo-islamique vers l’universalité ». 

Patrice Maniglier : Citoyen.nes de la Terre ! Repenser le cosmopolitisme à l’âge planétaire

Le cosmopolitisme est en crise. Après l’âge de la globalisation triomphante, les frontières reviennent en force. Pourtant, jamais dans l’histoire une perspective cosmopolitique n’a été mieux justifiée qu’aujourd’hui. Le bouleversement climatique, l’effondrement de la biodiversité, l’insistance des « limites planétaires », montrent que les échelles ne se laissent plus ordonner comme des poupées russes : l’action d’un individu peut désormais être en prise avec les cycles biogéochimiques planétaires et affecter tous les êtres terrestres. Mais pour relancer le projet cosmopolitique, peut-être faut-il en changer le fondement : l’appuyer non plus sur l’hypothèse d’une universelle nature humaine, mais sur le partage d’une Terre unique, quoique néanmoins pas homogène – une Terre multiverselle ! C’est parce que la Terre est multiple que seule une perspective cosmopolitique permet de penser une politique de la Terre.

Philosophe, Maître de Conférences au Départements de Philosophie et d’Arts du Spectacle de l’Université Paris Nanterre. Spécialiste de philosophie des sciences sociales (linguistique et anthropologie), d’esthétique et de théorie du cinéma. Il co-dirige la collection « MétaphysiqueS » aux PUF. 

Mélika Ouelbani : L’universel est-il un leurre ?

Les valeurs qu’on voudrait universelles sont plurielles par définition, parce qu’elles ne sont pas préétablies et sont par conséquent dynamiques. Cette démultiplication des valeurs ne signifie ni que tout est possible, ni que les désaccords sont inévitables. En effet, si la valeur se définit par ce qui est digne d’être estimé, n’y a-t-il pas « des choses » qui valent de manière partagée universellement ? Nous essayerons de préciser lesquelles.

Philosophe tunisienne et française appartenant au courant de la philosophie analytique, professeure émérite de l’Université de Tunis et professeur associée à l’Université de Paris IV – Sorbonne. Elle travaille sur la logique, la philosophie de la connaissance et la philosophie du langage. 

Restez connecté

M’abonner à la newsletter